Le Perdiguère, un sommet qui m’a hanté pendant de longs mois et m’a demandé plusieurs tentatives !
La première était fin juin 2023, après l’ascension du Carlit avec Delphin. Je ne compte même pas comme tentative quand je suis retourné seul à Luchon 2 mois après, fin août, et que le gardien du refuge du Portillon m’a annoncé qu’il avait neigé et que tous les sommets étaient verglacés et donc trop dangereux. Inutile de monter au refuge !
La deuxième vraie tentative était début juin 2024, encore avec Delphin. Et enfin la troisième tentative (la bonne !), au mois d’août 2024, seul cette fois.
Juin 2023
Le lendemain de notre succès sur le Carlit nous prenons la direction de Bagnères-de-Luchon dans la Haute-Garonne. Après une nuit passée en ville, nous laissons la voiture aux Granges d’Astau et prenons le sentier, qui passe par le lac d’Oô, pour monter au refuge du Portillon où nous arrivons après plus de 6 heures d’effort. Pas grand monde au refuge, un groupe d’une demi-douzaine de Catalans, 2 vieux baroudeurs qui ont fait le sommet du Perdiguère dans la journée, et deux jeunes héraultaises, Lydie et Lucile, avec qui nous faisons connaissance et qui comptent faire le sommet en passant par la crête, ce qui permet de faire d’autres 3000 au passage.
Mais le lendemain le temps n’est pas au rendez-vous ! Il pleut et il y a un épais brouillard, on y voit rien à 10 m. Nous décidons de laisser tomber et nous redescendons au parking, ainsi que les deux filles. Le jour suivant c’est le retour vers Paris.
Juin 2024
Quand avec Delphin nous prenons la route pour la Haute-Garonne, nous savons que les montagnes sont encore enneigées, et nous avons prévu l’équipement en conséquence : crampons, piolet, baudrier, corde…
Après une journée de voiture nous voici aux Granges d’Astau où nous avons réservé 2 chambres à l’auberge. Le lendemain matin nous sommes tout de suite au départ du sentier. À partir de 2100 m, après le refuge d’Espingo et le lac Saussat, la neige est présente, il faut chausser les crampons. Delf fait la trace devant, il est en pleine forme, moi je suis péniblement. Je rame. Je le sens pas pour le sommet… Enfin nous débouchons en haut de la crête, et nous voyons le refuge, mais il nous faut encore un bon moment pour y arriver. Nous avons mis quand même 8h30 pour arriver ! Nous avons ramé dans cette neige… Ça promet… !
Le lendemain il fait un temps magnifique. Nous partons pour faire la Voie Normale, comme nous l’a expliqué Régis le gardien. La voie par la crête de Litérole nous semble trop technique. Finalement nous n’irons pas très loin. Après avoir passé le barrage nous nous équipons des crampons, et nous longeons le lac du Portillon. Nous entamons ensuite la traversée au-dessus du lac. La neige est dure, nous avons des crampons, mais c’est quand même dangereux. Une chute et c’est la glissade dans les rochers et le lac 50 m plus bas. Delphin ne le sent pas, moi pas trop non plus. Demi-tour, fin de l’aventure, retour au refuge. Nous avons pris la bonne décision. Du coup nous redescendons le jour même au parking et repassons la nuit à l’auberge, où nous mangeons très bien d’ailleurs. Avant de rentrer le lendemain sur Paris.
Août 2024
Après nos vacances dans les Landes et à Pau, Béa et Océane rentrent en voiture à Sucy pendant que je prends le train pour Bagnères-de-Luchon, ou plutôt pour Montréjeau, où je prends une correspondance en autocar pour Bagnères-de-Luchon. En effet il n’y a plus de ligne SNCF dans cette ville. De là j’ai une navette qui m’amène aux Granges d’Astau.
Je prends le sentier que je commence à bien connaître, c’est la troisième fois que je l’emprunte. Mais cette fois ci je change de stratégie. J’ai réservé au refuge d’Espingo, à mi-parcours. Et le lendemain je monte tranquillement au refuge du Portillon. Ça me permet de faire 2 petites étapes de 3h20 et 3h30, pour me réserver pour la grosse journée du sommet. À l’accueil du Portillon, le gardien Régis me reconnait, et il se rappelle de mon challenge des SDF !
Le lendemain matin, après un bon petit déj’, je pars au petit jour. La journée s’annonce belle, pas d’orage de prévu. J’ai pas l’excuse de la météo, il n’y a plus de neige, c’est aujourd’hui ou jamais ! Je suis déterminé mais j’ai quand même un doute sur l’arête finale… Après avoir traversé le barrage je suis le sentier au-dessus du lac et m’engage sur le passage où nous avions fait demi-tour 2 mois plus tôt. Le sentier surplombe le lac, faut pas faire de faux pas ! J’étais tout seul jusqu’ici et je suis rattrapé par 2 autres randonneurs qui viennent du refuge. C’est un père et son fils. Le jeune m’avait parlé la veille de leur projet du Perdiguère. La mère, elle, est restée au refuge. Ils me dépassent et ne tardent pas à prendre de l’avance. Après la traversée, le chemin remonte dans un pierrier, genre 3 pas en avant 2 pas en arrière… Secteur assez pénible ! On s’engage ensuite dans une combe qui longe un long névé, ce n’est que de la caillasse et des blocs de rochers, pour arriver au Col supérieur de Litérole (3049 m). Ça fait 3 h que je suis parti, je fais une pause avant d’attaquer la dernière partie de l’ascension.
Je suis maintenant sur l’arête qui marque la frontière avec l’Espagne. Je repars en sachant que maintenant le sommet est proche mais que le plus dur reste à faire. Rapidement j’arrive à cette petite cheminée de quelques mètres dont m’avait parlé Régis. C’est du niveau II/III, de la rigolade ! Ensuite je remonte le long de l’arête en m’aidant des mains sur les blocs. Je vois le père et son fils qui redescendent vers moi, quand tout d’un coup ils font tomber une grosse pierre, qui ricoche non loin de moi… Ben alors les gars faites gaffe !
Encore un peu de grimpette et je débouche enfin au sommet du Pic Perdiguère (3222 m) ! Waouh ! J’ai mis 4 h pile ! Il y a là une espagnole à qui je demande de me prendre en photo. Quand elle repart j’ai le sommet pour moi tout seul pendant quelques minutes. Quelle vue à 360° ! D’autres personnes arrivent ensuite, surtout des espagnols. Je m’installe pour manger mon casse-croûte mais je n’ai pas faim, je n’arrive pas à avaler le sandwich au pâté, je mange juste une pâte de fruits et une pomme.
Je reste 40 mn avant de repartir. Je redescends très prudemment dans les blocs, et la cheminée que je redoutait tant se passe sans problème. Je refais une petite pause au Col et j’entame la longue descente, cette fois par le névé. La neige n’est plus gelée, elle a ramollie, c’est moins dangereux. Je me laisse même aller en glissant sur mes boots, comme des skis. Ensuite c’est le pierrier, interminable. Après la traversée au-dessus du lac je pense que je n’en ai plus pour longtemps. Je me trompe, je suis cuit, j’ai mal sous la plante des pieds, je n’avance plus et je fais de plus en plus de pauses. Quand j’arrive enfin au barrage je suis soulagé, je n’ai plus qu’à le traverser et m’installer au soleil à une table devant le refuge, avec une bonne cannette bien fraîche !
Le lendemain redescente jusqu’au parking des Granges d’Astau, en plus de 6 h, navette + car + train jusqu’à Pau + train-couchette de nuit pour Paris. Fin de l’aventure !